17 juillet 2017

L’esprit de confusion

“Nos pays ne peuvent accueillir l’ensemble des femmes et des hommes qui pour des raisons économiques cherchent à venir vivre dans nos pays.” Emmanuel Macron, mercredi 12 juillet

Outre la fâcheuse répétition du mot pays, étonnante de la part d’un homme qui maîtrise tellement sa parole et sa communication, la reprise de ce discours déjà éculé de discrimination “nécessaire” entre bons et mauvais migrants m’a interpelé.

Pas seulement à cause de la certaine habileté politique de l’homme du ni droite ni gauche qui, quelques jours avant de se démarquer de Marine le Pen en reconnaissant la pleine responsabilité de la France dans la rafle du Vel d’hiv, fait un clin d’œil à une grande partie de son électorat et au-delà, avec une distinction aussi perverse qu’incomplète.

“Humanité” d’un côté, “efficacité pratique” économique de l’autre. Et au milieu coule une rivière comme disait le film ?

Je ne pense pas céder à “l’esprit de confusion généralisé” en rappelant que personne ne migre en raison de quelque appel d’air et que, fuyant la guerre ou la misère économique, les personnes qui entreprennent ces longs périples vers nos contrées prospères “risquent leur vie dans leur pays”. On meurt aussi sur notre planète aussi de la mondialisation sauvage qui la gangrène.

Au milieu coulent des milliers de litres d’eau, pour reprendre le fil et revenir à nos moutons du jour. Depuis le début du mois des inondations meurtrières touchent l’Asie, montrant à ceux qui veulent bien le voir que le changement climatique est bel est bien à l’œuvre. Dans un rapport sur l’impact du climat publié vendredi 14 juillet, la Banque asiatique de développement évoque “un désastre annoncé” qui pourrait conduire à “un drame humanitaire” dans plusieurs pays de la région.

Le Bangladesh, où a été prise la photo du jour, est parmi les pays les plus menacés. D’ici à 25 ans il pourrait voir englouti un quart de son territoire et, en attendant, les inondations catastrophiques s’y intensifient. Les habitants résistent avec les moyens du bord, comme ici en emmenant brouter en bateau les animaux dans des pâtures ondées. Mais les solutions de fortune ne suffiront pas toujours.

Aujourd’hui, le Bangladesh présente à l’ONU un rapport sur le développement durable, qui rappelle que le développement durable ne doit plus être un simple slogan politique vide de sens et surtout d’effet et que “la communauté internationale se doit de renforcer des partenariats pour aider les pays en développement à lutter contre la pauvreté, les inégalités et les changements climatiques”.

Notre pourfendeur de la confusion généralisé – et ses compères – entendront-ils cet appel ? Ou bien on-ils déjà préparé les éléments de langage pour refuser toute aide – et toute responsabilité – le jour où les bateaux ne serviront plus seulement à mener paître les moutons mais mettront le cap à leur tour vers les îlots préservés d’une prospérité toujours mal partagée.

Le jour où nous serons tous menacés de couler.

Solidairement.

(Photo : Zakir Chowdhury)

Sous le nom de Sandel, la jeune Australienne Steph Small a publié The Shadows, une belle chanson d’alerte et d’espoir. Sa modeste contribution? C’était en 2009, déjà, et la vidéo a été vue… un peu plus de 46000 fois. Mais comme chaque pas compte, malgré tout, dans la lutte contre le réchauffement climatique ET la confusion mentale, je vous la propose en complément de programme.

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